LICENCIEMENT : Un témoignage anonyme ne suffit pas pour prouver une faute invoquée à l’appui d’un licenciement (Cass. soc. 4 juillet 2018 n° 17-18.241 FS-PB)

Maître Élodie Santelli - Avocat à Aix-en-Provence en droit pénal, droit des assurances, droit social et du travail, réparation du préjudice corporel

LICENCIEMENT : Un témoignage anonyme ne suffit pas pour prouver une faute invoquée à l’appui d’un licenciement (Cass. soc. 4 juillet 2018 n° 17-18.241 FS-PB)

Pour la première fois, la Cour de cassation se prononce sur l’admissibilité d’une preuve recueillie de manière anonyme, précisant que le juge ne peut pas fonder sa décision uniquement ou de manière déterminante sur un tel témoignage.

Au cas d’espèce, la direction éthique de la SNCF avait été saisie par deux agents en conflit.

Se fondant sur le rapport de la direction éthique, l’employeur avait notifié à l’un d’eux une mesure de suspension, puis l’avait licencié en raison des manquements dénoncés dans ce rapport.

Le salarié affirmait que les juges ne pouvaient pas fonder leur décision sur le seul rapport de la direction de l’éthique dès lors que ce document n’était pas signé, ne mentionnait pas l’identité de ses auteurs et que les témoignages y figurant étaient anonymes.

Bien que l’employeur n’ait produit au soutien de sa décision que le rapport de la direction d’éthique, la cour d’appel avait déclaré le licenciement justifié en considérant que l’atteinte aux droits de la défense fondée sur le caractère anonyme des témoignages n’était pas justifiée dans la mesure où le salarié avait pu en prendre connaissance et présenter ses observations.

Or, si le recueil de témoignages anonymes peut se concevoir dans le cadre d’une procédure d’alerte éthique, le salarié doit pouvoir, dans le cadre d’une procédure disciplinaire, se défendre utilement et doit à cet effet impérativement connaître les auteurs des témoignages réunis à son encontre.

L’employeur devait à tout le moins compléter par des attestations circonstanciées le rapport de la direction de l’éthique.

L’arrêt est cassé au visa de l’article 6 paragraphes 1 et 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Reprenant l’attendu de principe de la CEDH, la chambre sociale de la Cour de cassation considère que la cour d’appel a méconnu les exigences d’un procès équitable.

 

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.